Le Jardin à Mémère

Le Jardin à Mémère

«  C’est un jardin. On y cultive l’émerveillement, sans doute parce que les semences sont le présent de la Vie à elle même. Il est plein de jardinières, de visiteurs, de jardiniers, de visiteuses. Il y a même des bancs, un peu partout, pour s’asseoir et contempler le végétal. Il ne s’agit pas de végéter, mais de contempler, c’est le bon mot. Dans contempler il y a temple. C'est écrit «  jardin botanique  », à l’entrée,avec un plan. Ça l’a amusée la ptite vieille la première fois qu’elle a poussé le portillon de l’entrée. Un plan dans son jardin, pour se retrouver. Oui, elle perd un peu la tête mais quand même. Elle sait les reconnaître ses plants.Quoique, y’en a qu’elle n’avait jamais vu, c’est certainement pas elle qui les a planté là.Elle s’en serait souvenue, quand même.  Quand ils l'ont vue arriver au jardin ils l'ont accueillie comme une visiteuse  :   «  Bonjour madame si vous avez besoin d'un renseignement on est là  !  ». Elle avait répondu «  Oui oui c'est ça c'est ça, qu'est ce qu'il y a comme mauvaises herbes  !  », et, à petits pas s'était engouffrée dans le jardin, son sac en cuir marron pâle d'une main, son chapeau de paille sur la tête. Elle avait choisi son banc, sous le catalpa aux fleurs blanches comme ses cheveux. Le vent dans les feuilles elle s'était endormie. Personne n'avait osé déranger la petite vieille une main sur son sac, l'autre sur le bois chaud, une pluie de fleurs caressant ses lèvres entrouvertes. On ne l'avait pas vue repartir ce jour là. On ne la voyait jamais vraiment arriver non plus. Pourtant ,chaque jour, sa danse aux petits pas fidèles, venait habiter les allées.Avec son tablier bleu on ne savait plus trop si c'était une visiteuse ou une jardinière.  » extrait de Botanique et Vieille dentelle, écrit l'été 2008 au jardin botanique d'Alaije. par Marie Maison.